Pierre Boulez aime s’adresser directement aux mélomanes pour rendre son oeuvre plus accessible. Dans un concert-lecture donné à la Cité de la musique, il dirige et commente Sur incises (1996-1998), pièce pour trois pianos, trois harpes et trois percussions-claviers. Sa démonstration brillante et suggestive joue sur la sensibilité et l’intellect.

Avec ce film libre et audacieux, Andy Sommer nous accompagne au coeur de la pensée du maître. Incises était initialement une courte pièce commandée à Boulez pour l’épreuve de virtuosité d’un concours international de piano. Elle est devenue Sur incises, pièce plus conséquente, tour à tour méditative et flamboyante. L’oeuvre est divisée en deux grands volets : le premier est un agrandissement de la pièce initiale, le second un développement des idées déjà exposées. Boulez prend un plaisir véritable à jouer son rôle de pédagogue, à nous rendre presque familiers ces rythmes complexes et sophistiqués. Il déconstruit volontairement son travail, sans jamais en altérer le mystère. Andy Sommer se fait l’interprète visuel de la démonstration : alternance de plans larges et de plans resserrés sur les mains et le visage de Boulez et des musiciens de l'Ensemble intercontemporain, démultiplication des axes de vue, inserts de la partition, incrustations de concepts énoncés, tout concourt à une présentation limpide et originale de l'oeuvre.

(Mario Fanfani)