Un producteur (interprété par Sharif Andoura) donne rendez-vous à un acteur (Jacques Nolot), ami de son oncle récemment décédé. L’acteur lui avait parlé d’un lieu secret, promesse d’un film possible ; le neveu veut en savoir plus. Cédric Venail filme en champ contrechamp la rencontre des deux hommes dans un café. De leur échange, naît peu à peu l’image mystérieuse d’une alcôve cachée derrière un miroir sans tain dont la seule fonction semble être de voir sans être vu.  

Comme Une Sale Histoire de Jean Eustache (1977), A discrétion interroge le désir de voir du spectateur à travers un récit qui donne la part belle au voyeurisme. Avant la rencontre, quelques plans dans un train présentent le producteur en train de regarder les pieds d’une femme : déjà voyeur, il est en attente d’une histoire à laquelle le personnage de Nolot ne fera que répondre. Dans le café, plus les cadres enferment les deux personnages – au point de ne jamais dévoiler le visage du serveur et de faire disparaître tout client – plus les réminiscences de l’acteur rendent le lieu visible. Il explique avoir perdu son désir quand le spectacle est devenu "mal joué", comme interprété par des acteurs et non plus seulement créé par lui. La rencontre est suivie d’un plan derrière le miroir sans tain qui réinterroge tout le récit : ce que l’on voit est-il mis en scène ou est-ce un plan volé, organisé par notre seul regard ? A discrétion est, de bout en bout, un hommage au pouvoir créateur du spectateur.

(Martin Drouot)