Dans la frénésie et l’agitation des rues de Taipei, capitale ultra-moderne de Taïwan, une jeune femme désorientée erre à la recherche d’un pont au-dessus d’une avenue encombrée par la circulation. Au cours de sa déambulation, elle croise un jeune homme qui se rend à un casting de film porno. Rien ne les réunit si ce n’est la solitude et l’indifférence à laquelle ils sont livrés.

Le pont n’est plus là offre un épilogue désabusé à Et là-bas quelle heure est-il ?, long métrage du taïwanais Tsai Ming Liang, réalisé un an plus tôt. On y retrouve la jeune femme et le marchand de montres qui s’étaient rencontrés sur ce pont entre-temps disparu, avant que la jeune femme ne quitte Taipei pour Paris. Alors qu’un lien mystérieux semblait les unir au-delà de la distance géographique, Le pont n’est plus là raconte leurs retrouvailles manquées. Ils se croisent sans se reconnaître, poursuivant leur chemin dans une ville-labyrinthe qui décide seule de leur sort. La ville, dont le cinéaste filme l’architecture avec une précision proche de celle d’Antonioni, est le personnage principal de cette histoire. Les cadres admirables découpent et démultiplient l’espace par un jeu de reflets et de vues vertigineuses où l’humain, fragile et isolé, semble dérisoire, sentiment accentué par le somnambulisme et le destin médiocre des personnages.

(Sylvain Maestraggi)