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Scènes de chasse au sanglier

2007, documentaire, 46 min, couleur

Réalisation : Claudio Pazienza

Vidéos

Poème, essai, manifeste ou élégie, Scènes de chasse au sanglier met en procès les images, les mots et tout ce qui prétend représenter le réel. 

Images

Résumé

Poème, essai, manifeste ou élégie, Scènes de chasse au sanglier met en procès les images, les mots et tout ce qui prétend représenter le réel. Comme dans ses films précédents, Tableau avec chutes ou Esprit de bière, Claudio Pazienza se met en scène dans le rôle d’un cinéaste en quête du sens des images et d’un fils d’ouvriers italiens immigrés en Belgique. Mais la mort du père rend vaine toute image, rien ne peut manifester le vide qu’il laisse.

Au début du film, à la voix off "tu dis un arbre" répond l’image d’un livre ouvert au milieu d’un bois ; on y voit un arbre sous lequel on lit arbre. Puis, dans un paysage meurtri par une urbanisation médiocre, à l'écran un arbre à la forme tortueuse, moitié mort moitié verdissant. Cet arbre-là est-il plus réel que celui du livre ? Ou n’est-ce qu’une métaphore de cet être double que forme le père mort et le fils vivant ? L’image qui unit le visage mort du père à celui du fils à son chevet, les deux "pour la dernière fois dans le même cadre", que dit-elle du deuil, de l’absence irrémédiable ? Insatisfait des mots comme des images, le cinéaste explore le toucher, pris dans ses diverses acceptions ; la sensation tactile tout d'abord, les pieds nus fouillant le sol ; puis la blessure avec la bête touchée à mort par la balle du chasseur. Le film s’achève sur l’empreinte d’une main dessinée sur la peau dépecée de l'animal. Touché-coulé : un film sur l’impossibilité du cinéma peut-être ?

(Eva Ségal)

Descriptif technique

Production
Komplot Films etc., Les Films du Présent, Arte France
Participation
CNC, ministère des Affaires étrangères, CR Provence-Alpes-Côte d'Azur, Procirep, Angoa
Réalisation
Claudio Pazienza
Année
2007
Durée
46'
Double disque
Couleur / N&B
couleur
Genre
Documentaire
Diffusion
  • Prêt aux particuliers par l'intermédiaire des médiathèques
  • Projection publique
  • Diffusion en ligne

Avis

Sélectionné par

Claudio Pazienza instaure une proximité de l’intime, un affleurement des questionnements les plus profonds qui deviennent la matière même du film. Nous le suivons parce qu’il cherche ce que nous cherchons ou avons renoncé à chercher. Et ce faisant, il révèle et réveille nos quêtes enfouies, oubliées. Le réalisateur avance sans certitude : au contraire, il soumet le réel au doute des images, de toutes les images (numériques, photographiques…), images elles-mêmes happées par le doute dans une subtile mise en abîme. Dans cette démarche, seul le toucher semble pouvoir encore certifier le réel. Dans sa sagesse, Pazienza ne nous devance pas, il nous attend. Il distend le langage jusqu’à en faire des litanies, des incantations, nous laissant le temps de la répétition pour entrer dans cette exploration du monde devenu rituel partagé. Fasciné, le spectateur assiste alors à une leçon de cinéma riche de sens : quelles émotions, quels souvenirs, quel imaginaire s’attachent aux images ? Quelles images pour ce qui a cessé d’être, pour ce qui n’a plus de nom ? À la main inconsolable, aux images qui ne disent plus, un seul remède nous dit Pazienza : l’invention. Par son exigence formelle qui traduit une profonde interrogation sur le réel et ce que les images nous en donnent à voir, par la subtilité de son sujet qui évite tous les travers de l’autofiction pour n’en garder que l’essentiel, ce film a toute sa place dans les collections des médiathèques. Aux vidéothécaires d’imaginer les parcours singuliers qui pourront mener les spectateurs à l’orée de ces scènes de chasse.

Montserrat Etesse (Bibliothèque de la Maison pour Tous - Médiathèque de Choisy-le-Roi)