Aux confins de l’Italie et de la Slovénie, Trieste fut autrefois la rivale de Venise et le port florissant de l’Autriche-Hongrie. Sous un pâle soleil d’automne, quatre jeunes gens désœuvrés, une Française, un Italien, une Macédonienne et un Burkinabè, dialoguent et déambulent à la recherche de leur destin. La mer étale, comme endormie, ne semble rien promettre. Quand soudain se lève une tempête.

Les grands ports, qui furent des lieux d’aventures, d’échanges commercial et culturel, d’embarquements et débarquements, se sont vidés en moins d’un siècle. Leurs docks fantômes reposent derrière des grilles dans l’attente d’être reconvertis, leurs quais immenses, où se serraient les navires, se prêtent à d’interminables promenades. On peut s’y sentir échoué, comme les quatre personnages de Terra di nessuno. De leur diversité, leur jeunesse, de la ville-frontière où ils se trouvent, pourraient sortir bien des possibles. Au lieu de quoi, ils buttent contre un invisible obstacle. À l’image de la statue de James Joyce sur le pont du Grand Canal, ils se promènent sans avancer. Surgissent alors des récits où se dessine l’envers de l’utopie européenne : la guerre de Yougoslavie, les massacres de la Libération perpétrés par l’armée de Tito, la désillusion des migrants venus d’Afrique. Quelle est donc cette inquiétude, cette faute enfouie, qui obscurcit le ciel vers lequel ils se tournent ?

(Sylvain Maestraggi)