Au début du XX^e siècle, la jeune Yuna quitte sa Bretagne natale pour s’installer en région parisienne, espérant y "vivre ses rêves". Au lieu de ça, elle se heurte à une dure réalité, entre exploitation, chômage et perte d’identité. Entremêlant approches historique et romanesque, Mathilde Jounot, nièce de Yuna, reconstitue à la première personne ce voyage, qui est celui de nombreux Bretons à cette époque.

"L’histoire de Yuna, c’est notre histoire à tous" dit en effet Gérard Réquigny, président de l’Association des Bretons de Saint-Denis : l’histoire de ces Bretons qui quittent en masse, dès la fin du XIX^e siècle, une région pauvre, délaissée par la Révolution industrielle et peuplée de "hordes de miséreux" (Jean Rohou, écrivain et universitaire). Paris apparaît alors comme l’endroit où l’on peut "décider de son destin". Mais, comme ses compatriotes, Yuna découvre que les seuls emplois accessibles sont les plus difficiles, dangereux et mal payés ; que les Bretons sont perçus par les Parisiens comme des "gens inférieurs", des "ploucs" (Jean Rohou) ; qu’une main d’œuvre encore meilleur marché afflue de toute l’Europe. Demeure malgré tout entre ces immigrés bretons une forte cohésion qui, sous l’égide de personnalités (l’Abbé Cadic, Marcel Cachin, les frères Trémel...), favorisera peu à peu l’émergence d’une véritable force politique contribuant à améliorer progressivement leur sort.

(Damien Travade)