Au travers du discours d’un allemand en visite et de peintures d’un Brésil au temps des colonies, le Brésil actuel apparaît. Derrière des grilles, derrières des vitres, apparaissent les descendants des esclaves d’antan : les agents de sécurité des résidences des quartiers riches. Les temps ont-ils vraiment changé ?

Au fur et à mesure du film, cinéma copains et pátio vazio entremêlent des peintures du Brésil colonial où figurent des maîtres et des esclaves, avec des images du Brésil contemporain. D’abord distinctes, ces images finissent par se superposer. Cette esthétique du palimpseste est sans équivoque, l’esclavage est aboli mais les dynamiques de domination, le racisme et les inégalités persistent. Bien que fictifs, les discours en voix-off des agents de sécurité et des propriétaires synthétisent à la fois la colère des uns et le très vieux sentiment de supériorité des autres. Mais ce qui se joue ici, est avant tout une bataille d’images. En transformant les dessins coloniaux en tableaux vivants où les personnages apparaissent dans des situations contemporaines, les réalisateur.ices nous montrent que, bien qu’elles se transforment, les images et donc les situations persistent. Les fondus, les surimpressions, les mélanges d’images de surveillance et de tableaux coloniaux, sont autant de moyens pour dire que les images construisent notre perception du monde et nous indiquent notre place. En les mêlant les unes aux autres, ce film se fait activiste puisqu’il révèle leur généalogie, mais aussi puisqu’il les critique jusqu’à en proposer de nouvelles : les images de la lutte. La reproduction infinie des images et donc des imaginaires peut être envahie, enrayées, et cela se fait caméra au poing.

(Léo Bourdet)