Originaires de Gorazde, Edim, Samira et leur fils Damir ont quitté la Bosnie en guerre en 1992 et se sont posés, un peu par hasard, à Nantes. Quatre ans plus tard, après les accords de Dayton, le retour tant attendu au pays n'était plus une certitude. Avec leurs témoignages, souvent chargés d'émotion, et ceux de leurs proches à Gorazde, Catherine de Grissac et François Gahier abordent la question complexe du retour pour les réfugiés de guerre.

Pendant les années de guerre, comme le million de personnes qui a fui la Bosnie, Edim et Samira, suspendus aux rares nouvelles des parents, vivent dans l'inquiétude et ne pensent qu'à une chose : la fin du conflit qui leur permettra de rentrer. Mais le temps passe, ils s'installent, Damir parle parfaitement le français, un autre enfant naît à Nantes. Même à distance, cette guerre les a changés, elle a brisé leur attachement à la terre natale ; comme un sentiment de n'être plus chez soi nulle part, alors, pourquoi pas Nantes ? Ce sentiment est confirmé quand ils retournent un mois à Gorazde en 1997. Samira est oppressée par la ville ; ils ont honte de ne pas avoir été là et se sentent coupables. Ils veulent savoir, connaître les détails, mais ceux qui sont restés préfèrent le silence pour oublier le plus vite possible : l'horreur ne se raconte pas à ceux qui ne l'ont pas vécue. Damir, lui, entretient l'espoir qu'ils rentreront un jour, car il se sent plus en sécurité à Gorazde.

(Marc Guiga)