Les scènes de baignade féminine forment un topos pictural, un motif à résonance souvent biblique ou mythologique, qui a traversé l'histoire des arts presque sans coup férir. De Diane surprise par Actéon à Hedi Lamarr dans le film Extase de Gustav Machaty (1932), Sylvain Roumette parcourt tableaux classiques et contemporains, films et photographies pour mieux suivre l'évolution de ses représentations.

Pérennité ne signifie pas forcément immuabilité. Ainsi les femmes au bain ne furent pas toujours soucieuses de propreté mais de pureté, et leur nudité surprise par un tiers révélait le plus souvent une grande pudeur. D'autres exemples pourraient rendre compte des évolutions de ce thème pictural. Sylvain Roumette organise son parcours en plusieurs chapitres qui sont autant de clés de déchiffrement : la femme au bain comme scène primitive, le regard tiers et le voyeurisme comme élément structurant la scène, la pudeur devenue provocation par simple jeu de regard, l'eau comme représentation allégorique du corps de la femme, le désir de propreté autorisant désormais les gestes simples de la toilette... Cette démarche transhistorique permet de confronter en des rapports dynamiques les photographies de Brassaï, de Bonnard et de Ronis, les gravures de Dürer, les toiles de Titien et Raphaël, ou, pour mieux signifier la progressive évaporation du motif, les classiques du pop'art.

(Mathieu Capel)