Un jeune homme haletant se tient sur le toit d’une tour au bord du vide. Derrière lui, le panorama de Johannesburg. Des voix l’appellent. Est-il en fuite ? Va-t-il sauter ? En une suite stupéfiante de dix plans-séquences, tournés à la steadicam, Nicolas Boone nous invite à plonger dans le quotidien parfois brutal du quartier de Hillbrow – entre réalisme documentaire et fantasmagorie urbaine.

Hillbrow, quartier déclassé de Johannesburg. En son centre, la tour de Ponte City surmontée d’une publicité pour téléphone portable témoigne de l’avenir auquel le site était promis. La cité radieuse destinée à la bourgeoisie blanche dans les années 1970 est aujourd’hui un quartier pauvre, peuplé essentiellement de Noirs et réputé dangereux. Au mépris des préjugés, Nicolas Boone a dessiné dix itinéraires, nourris des récits de ses guides, pour construire autant de plans-séquences et donc autant d'histoires. Anecdotes, situations, tableaux, ces histoires de rue rendent compte d’une réalité violente certes (agressions, braquages), mais aussi parfois plus apaisée : comme cette ballade un soir d’été sur une colline dominant les immeubles. Malgré le bruit et la fureur, la grâce constante des plans-séquences, précisément chorégraphiés, enchante le spectateur qui croit explorer la ville comme en marchant, dans une succession de points de vue baignés de rumeurs lointaines.

(Sylvain Maestraggi)