Les œuvres d'une trentaine de photographes prêtent leur visibilité à des mouvements de caméra savants et sensuels, qui, en décadrant les images, incitent le spectateur à une plongée fantastique et fantasmatique dans l'univers de Madeleine Millot-Durrenberger, collectionneuse. Plus qu'un portrait de femme, le scénario, très construit, offre celui d'un "regard sidéré", porté et soulevé sans cesse par le mouvement de voix off lisant des textes.

Lorsque M. Millot-Durrenberger a conçu l'exposition Comme des ronds dans l'O, elle partait de la constatation que nombre des œuvres qu'elle avait réunies comportaient des bulles, ronds et cercles que le film retrouve en passant de la circularité pleine d'une tasse de thé à celle d'une lune ou d'une tête. Entre celles qui "montrent le silence" et celles qui fragmentent ou retiennent les temps d'un corps, les images de la collectionneuse viennent se fondre dans sa vie, dans ses textes et dans ceux de Denis Roche, Erik Bullot, Isabelle Henry et Christine Baudillon. La fausse interview, mise en fiction, se déroule à table, en compagnie d'enfants, où Madeleine propose des actions comme métaphores de processus photographiques : par exemple, la mise sous plastique d'aliments à des fins de congélation. En rendant hommage aux objets, la photographie "fabrique-t-elle" des ex-voto ? Et Persée était-il le patron des photographes lorsqu'à Méduse il renvoya son image par le biais d'un miroir ?

(Christine Rheys)