Si l'homosexualité a toujours été présente dans l'Empire ottoman, il fallait toutefois la vivre dans le secret, comme dans bien d'autres pays. La modernisation de la Turquie a permis sa visibilité, notamment dans le monde du spectacle, mais la montée de l'islam conservateur limite encore la tolérance. La réalisatrice nous montre le quotidien de plusieurs travestis et transsexuels à Istanbul.

Le troisième sexe ne se compose ici que d'hommes à diverses étapes de leur transformation vers leur nouvelle condition de femmes. Elles parlent de leur mode de vie, de leurs amants, de leurs relations familiales, de leurs contradictions : porter le voile, faire le ramadan, et penser que la modernité est une bonne chose. C'est une vie où la solidarité et la fête prédominent, bien que le seul horizon soit la prostitution. Les plus chanceuses pourront tenter une carrière dans le spectacle ou devenir des personnages médiatiques. Pour l'une, l'opération est une certitude malgré la crainte des conséquences de l'acte sur ses plaisirs sexuels ; pour une autre, l'obtention de l'identité féminine lui permettra de travailler sans peur de la répression policière, qui ne s'applique qu'à la prostitution masculine.

(Nathalie Magnan)