Au nord de la Colombie, sur les rails d’un chemin de fer abandonné, Dolly et ses collègues parcourent la région à bord de leur motorrodillo. Constituées d’une moto en guise de locomotive et d’une grande planche montée sur les rails, ces embarcations précaires transportent de multiples marchandises et font office de navette pour les travailleurs et les enfants.

Embarquée sur les rails aux côtés de Dolly et de quelques autres personnages, la caméra d’Alba Jaramillo brosse le portrait d’une région. Ici, il n’y a pas de bus, et les conducteurs de motorrodillos sont les garants du fonctionnement de la société. Dolly est la seule femme de la coopérative de ces conducteurs, et bien qu’il y ait des habitants qui doutent de sa capacité physique à exercer ce métier exigent, elle continue d’affirmer sa place. Pour autant, malgré leur rôle essentiel, la conduite des motorrodillos est menacée par de nouvelles réglementations. La coopérative doit alors négocier avec les autorités, qui se contredisent sans cesse, pour faire tenir la colonne vertébrale de la région. La vitesse, le son unique des motorodillos, les paysages et la dangerosité de certaines zones du parcours fascinent mais Alba Jaramillo ne cesse de nous rappeler à quel point l’équilibre de ce système est précaire dans l’absence d’aide des pouvoirs publics. Ce film vient nourrir notre imaginaire politique en célébrant une communauté solidaire qui invente de nouvelles manières de vivre collectivement tout en nous avertissant du cruel cynisme de l’État qui n’a de cesse de vouloir contrôler ceux qui agissent, là où il ne fait rien. ;

(Léo Bourdet)