Un soir au quartier des Pins à Vitrolles, Cédric, qui va passer son bac et rêve de partir vivre à Londres, insiste pour emmener son pote Farès en boîte. Malgré leurs tenues endimanchées, ils se font refoulés à l'entrée. "Un Noir et un Arabe, tu savais bien qu'on allait se faire pointer" conclut rageusement Farès, qui ne voit pas l'intérêt de sortir de sa cité. Avec une belle efficacité, Romuald Rodrigues Andrade raconte l’amitié entre deux jeunes hommes et, à travers elle, l’enjeu social qui la dépasse et la détruit.

L’écriture creuse des situations visuelles autour de l’idée que chacun essaie de faire jouer à l’autre un rôle. Alors que Cédric a obligé Farès à mettre un costume dans l'espoir de rentrer dans une boîte de nuit, Farès pousse plus tard Cédric à venir avec lui se venger d’un spectateur ayant eu des propos racistes lors d’un match de foot. Les deux séquences, dont les trajets en voiture font le lien, se font écho et filent la métaphore du titre. C’est bien entre deux routes que Cédric doit choisir, et plus profondément entre deux camps : "Tu es avec eux ou t’es avec nous ?" lâche Farès, résumant bien le dilemme de son ami qui aimerait ne pas avoir à choisir. La violence éclate d’ailleurs non pas sur le terrain de foot mais à sa frontière, mettant en image la barrière infranchissable entre inclusion et exclusion. Tout au long du film, le réalisateur scrute de très près les visages de ses acteurs, Amine Guedja et Idir Azougli, comme pour mieux révéler leur inadéquation à un monde où l’intégration se fait tête baissée.

(Martin Drouot)