Sur un plateau blanc, Alain Françon répète avec ses comédiens Pièces de Guerre. Le metteur en scène se livre à une réflexion sur le paradoxe de "l'innocence radicale en tant que ressource d'humanité en nous, qui échappe et résiste à tout conditionnement". Une réflexion qui pose la question de la mise en scène de la violence et postule l'imaginaire comme révélateur de la réalité.

Les trois Pièces de guerre ont été créées en 1994 au festival d'Avignon et ont reçu le Molière 1995 de la mise en scène. Valérie Dréville, dans le rôle de la mère s'accrochant au corps de son enfant sacrifié par l'absurdité de la guerre, y est exsangue, ruinée, à l'instar de cet univers post-atomique de Bond qu'Alain Françon a si bien su rendre. Si pour le metteur en scène, Edward Bond est un auteur comique et un homme paisible, son théâtre analyse les conduites sociales qui déterminent la violence, afin d'en comprendre les processus. Dans de courtes séquences, l'auteur britannique ("né avec Auschwitz et Hiroshima", Françon) s'exprime sur ses textes et l'inhumanité. Il fait néanmoins le pari que la fiction peut encore nous éclairer sur le réel, et peut-être, nous faire changer.

(Marie-Christine Balcon)