Monteuse de formation, Pascale Hannoyer a réalisé plusieurs courts métrages avec des enfants. Fidèle à son inspiration, elle raconte ici l’histoire d’Alma qui, avec son frère, trouve une grotte dans la forêt. La petite fille, effrayée autant que fascinée, s’enfonce chaque jour un peu plus dans l'obscurité et finit par y rencontrer un homme blessé. Le réel s’invite alors dans le conte mais sans jamais lui faire perdre ses atours merveilleux.

Si l’histoire est une variation autour de la rencontre d’un enfant avec un géant, à la manière du Roi des Aulnes - conte que lit la grand-mère d'Alma -, l’esthétique s’inscrit dans un fantastique gothique particulièrement bien revisité : un château, une forêt, deux enfants, une chevauchée, un manteau qui fait office de cape… Il y a peu d’effets dans le film qui s’en tient à son titre : le visage magnétique de la petite Dora Jacobina et le noir de la nuit. Le mystère n’est jamais dissipé puisque quand la petite fille avance dans la grotte munie d’une allumette, c’est son visage qui est éclairé en clair-obscur et non le lieu. Plus tard, quand l’homme vient à hanter les rêves d’Alma, la chevauchée dans la nuit bleutée est digne d’un film muet et semble emprunter au Nosferatu de Murnau, la peur en moins. L’homme restera sans nom, et la réalité n'apparaitra qu’au son – la sirène d’une voiture de police au loin. Le film a la ferveur des contes d’autrefois car il n’explicite jamais le réel, il reste du point de vue de l’enfant : elle seule rêve, et donc voit.

(Martin Drouot)