Venu d'Argentine, Jorge Lavelli (né en 1932) s’installe à Paris en 1961 et entame une carrière internationale. Il évoque avec Dominique Darzacq son parcours, ses influences artistiques et son travail avec les acteurs. À travers les soixante-dix pièces qu'il a montées jusqu'à aujourd'hui, le théâtre s’assimile pour lui à une forme "d’expression totale", où le corps, l’écriture et la musique fusionnent harmonieusement dans ce creuset qu’est la représentation.

Acteur au sein d’un mouvement artistique de création et d’opposition anti-péroniste à Buenos Aires, Lavelli poursuit à Paris sa rencontre avec le théâtre par une mise en scène remarquée du Mariage de Gombrowicz. Cette création porte déjà en elle ce qui va marquer son style et son univers théâtral : un jeu non réaliste axé sur l’énergie, à la fois physique et lyrique, un goût du baroque, de la violence et de la provocation, et une présence forte de la scénographie comme de la musique totalement intégrées au spectacle. Entouré d’une équipe d’acteurs atypiques (Michel Aumont, Judith Magre, Catherine Hiégel ou Roland Bertin), Lavelli fait découvrir en France des auteurs comme Copi, son "frère" argentin. De 1987 à 1997, il prend la tête du Théâtre de la Colline qu’il consacre exclusivement à la création contemporaine, affirmant ainsi la présence vivante et renouvelée d’un théâtre critique, militant, qui entre en résonance avec l'état actuel du monde et de la société.

(Marc Moreigne)