A ceux qui avançaient que le rock était mort, les années 1980 ont répondu par une explosion de jeunes groupes. Les scènes les plus actives du rock alternatif sont d'abord celles des banlieues et des villes de province, touchées par la morosité et la crise. Au Havre, à Brest, à Rennes, à Bordeaux ou à Paris, le rock colle à la réalité d'une jeunesse à qui les rêves des années 1960 ne sont plus permis.

Michel Vuillermet puise notamment dans les archives de l'émission Les Enfants du rock (magazine de télévision de 1982 à 1988) et s'attache à dépeindre, à travers une trentaine de groupes de la scène rock, la jeunesse française des années 1980. Au Havre et à Brest, c'est la situation sur la "frontière franco-américaine", où l'on préfère attraper le ferry de Roscoff que sombrer dans le blues de la Peuge (les usines Peugeot). A Paris 19^e arrondissement, ce sont les petits bars que l'on ferme pour cause de tapage ou de clientèle jeune, simplement. Partout, c'est "l'envie de vivre, de tout casser" face au froid, à l'ennui, au chômage, à l'isolement. Des interviews collectives, les rares images de groupes de légende live, des squatts, des bars, la famille aussi : un témoignage sur cet âge ingrat que furent les années 1980.

(Anaïs Prosaïc)