Au pied du col de Montgenèvre côté italien, deux femmes trient des sacs de bottes dans un local de la Croix-Rouge. Côté français, un homme parvient au refuge de Briançon, transi de froid ; il est pris en charge par des bénévoles pour se réchauffer. Ses bottes, mises à sécher, retourneront en Italie par la route. "Chaque nuit, des hommes venus d'Afrique de l'Ouest tentent de franchir la frontière à pied" : des deux côtés, la solidarité s’organise. 

En suivant les trajets aller-retour de ces centaines de paires de bottes, Hélène Baillot et Raphaël Botiveau rendent compte d’une sombre réalité que les aides bénévoles aux migrants tentent d'adoucir. Et les images sont cruelles. Le jour, la station bat son plein d'activités et les skieurs dévalent les pentes. La nuit, alors que les dameuses rentrent en piste phares allumés, que les canons à neige se mettent en route et que les vacanciers s'éparpillent dans les restaurants, des silhouettes s'enfoncent dans l'obscurité et dans la neige, sous couvert des sapins. Au plan du poste frontière routier en plein soleil, où les policiers observent les véhicules lentement passer, les réalisateurs opposent celui de deux jeunes gens la nuit, jumelles vissées aux yeux, guettant ces ombres furtives descendant de la montagne pour les diriger vers plus d'humanité.

(Noé Vidal-Giraud)