L'implosion de deux tours des Mureaux (Yvelines) en 1992 a libéré la perspective, mais Le Fil d'Ariane, promenade rectiligne qui va de la Seine aux cités HLM, a bien du mal à y frayer ses trois kilomètres de longueur. La plasticienne Françoise Jolivet, qui, associée à l'architecte Bernard Huet et au paysagiste Philippe Raguin, a conçu ce projet d'art urbain, semble depuis huit ans tenir seule ce fil à bout de bras, entre polémiques politiques et habitants désenchantés.

Pour désenclaver les quartiers HLM, faire se rejoindre les zones anciennes et nouvelles, la municipalité a choisi le projet ambitieux de Françoise Jolivet : une bande rectiligne de granit rouge au sol, bordée de petits pavés de marbre blanc, jalonnée de places, d'aires de jeux, de jardins et de sculptures perchées sur de hautes colonnes. Bien que financé en majeure partie par l'Etat, la Région et la Communauté européenne, ce geste architectural va déclencher dès sa mise en oeuvre une polémique telle que, huit ans plus tard, un peu plus d'un kilomètre seulement a été réalisé. Les habitants interrogés, focalisés sur les problèmes liés au chômage ou à la délinquance, restent dubitatifs, quand ce n'est pas l'élu Front national qui monte au créneau en conseil municipal. Envers et contre tout, l'artiste arpente la cité, écoute, explique et convainc. Mais la revalorisation de l'image du quartier suffira-t-elle à atténuer le malaise banlieusard ?

(Marie-Christine Balcon)