Théophane vit à Guingamp, au nord de la Bretagne, dans un foyer de jeunes travailleurs. Comme il l’annonce lui-même dès l’ouverture, ce film est son portrait et le portrait de sa ville. Un portrait à la fois documentaire et imaginaire, récit de toutes les contrariétés auxquelles Théophane s’affronte et qu’il parvient à surmonter, tandis que venu de la mer, un brouillard se lève qui engloutit la ville.

Plus qu’un simple portrait, il s’agit là d’une vie de Théophane. Bien qu’encore très jeune, Théophane ne cesse d’évoquer les épreuves de l’existence et la manière dont elles pourraient peser sur la suite des événements. Comme le suggère la chanson Forever Young, entendue sur les images d’un bistrot dont la clientèle défraîchies a l’air un peu perdue, la jeunesse est un moment décisif : celui de l’entrée dans le monde. Théophane le sait bien, qui rêve d’un emploi stable et de fonder une famille en regardant passer les avions. Pour maintenir cet espoir, il semble prêt à renverser tous les obstacles : le travail répétitif, la promiscuité du foyer, les rivalités amoureuses… Cette vitalité contraste avec le décor campé par le film : une ville morne et déserte qui s’anime les jours de match. À mesure que le brouillard gagne la côte, une violence jusqu’ici refoulée envahit les pensées du jeune homme. Mais c’est encore sa vie intérieure qui cherche à résister aux préjugés du regard.

(Sylvain Maestraggi)