Sous la dictature Ceaucescu, les écrivains affrontaient la censure, mais aux yeux du peuple, ils incarnaient la conscience nationale : des dizaines de milliers de lecteurs dévoraient leurs ouvrages. La fin du communisme a largement ouvert le champ des possibles mais réduit le lectorat. Renvoyés à la solitude et à la précarité, les écrivains s’inscrivent désormais dans la modernité européenne à travers une grande diversité de formes et de thèmes.

"Pourquoi écrivez-vous ?" ; "Comment avez-vous débuté ?" ; "Quelles contraintes extérieures affrontez-vous ?" ; "De quelle grande œuvre rêvez-vous ?" Dominique Rabourdin soumet à ces questions douze écrivains roumains dont le nom commence à être connu en France : Ana Blandiana, Gabriela Adamesteanu, Stefan Agopian, Gheorghe Craciun, Vlad Zografi, Dan Lungu, Simona Popescu, Ion Muresan, Marta Petreu, Letitia Ilea, Mircea Cartarescu, Cecilia Stefanescu ; des célébrités confirmées, des débutants déjà couronnés de succès, des poètes, des dramaturges... Beaucoup passent du roumain au français sans effort, comme si la France était leur seconde patrie. Ils habitent la capitale ou la province, aiment la poésie des villes ou celle des champs. Fuyant le réalisme socialiste autant que le misérabilisme, ils explorent les voies de l’imagination, de l’érotisme, de la recherche formelle ou de la mystique. Beaucoup déclarent écrire tout simplement pour se connaître eux-mêmes ou trouver le repos.

(Eva Ségal)