Pierre-Jacques Dusseau, psychologue et anthropologue, étudie les objets confectionnés en prison. Une collection hétéroclite de pièces bricolées pour échapper à l’enfermement, reflets de la solitude et de l’ingéniosité de leurs créateurs. Réalisé en noir et blanc, dans un format carré, le film se concentre sur les gestes délicats du chercheur qui les manipule pour nous donner à sentir leur fragilité.

L’anthropologue n’appareille pas ici pour d’aventureux voyages, comme Michel Leiris pour L’Afrique fantôme ou Lévi-Strauss pour de Tristes tropiques - auteurs auxquels Dusseau aime faire référence - mais il reste sur le quai et devient étranger au sein de sa propre tribu. Les objets qu’il prélève dans le monde à part de la prison sont chargés d’images : figures et paysages sculptés, maquette de navire baptisé Perpette, cellule carcérale en bois d’allumettes. Ils frisent le minuscule : briquet-fer à souder, noyau d’olive, coquille de noix. Ils recèlent des creux, des vides, qui sont autant de cachettes, d’espaces dérobés à la surveillance et à la promiscuité. Objets confisqués, offerts en témoignage ou dont on se débarrasse, nimbés de malaise, à peine dégagés des déchets dont ils sont constitués. Objets-traces, archéologie de vies misérables. Objets mystérieux qui ont tant à dire sur les vertus de l’homme, fût-il criminel : patience, espérance, invention, habileté.  

(Sylvain Maestraggi)

Prix Art & Caméra (doté par le CNC) au Festival de l'histoire de l'art de Fontainebleau 2015.