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Primitifs
“Nous avons voulu fuir la comédie, le spectacle, pour entrer en prise directe avec la vie. Mais la vie même est aussi comédie, spectacle. Mieux (ou pire) : chacun ne peut s’exprimer qu’à travers un masque et le masque, comme dans la tragédie grecque, à la fois dissimule et révèle, fait porte-voix. Au cours des dialogues, chacun a pu être à la fois plus vrai que dans la vie quotidienne, mais en même temps plus faux. Cela signifie qu’il n’y a pas une vérité donnée, qu’il suffirait de cueillir adroitement sans la flétrir (c’est tout au plus la spontanéité). La vérité ne peut échapper aux contradictions, puisqu’il y a des vérités de l’inconscience et des vérités de la conscience ; ces deux vérités se contredisent. [...] Peut-être avons-nous fait surgir l’inquiétude de la vérité ?” (Edgar Morin 1)
Un Eté + 50 confirme ce qu’on pouvait pressentir à la vision de Chronique d’un été : il y a un inachèvement dans ce film, un mélange d’ambition et de maladresse, de ratés et d’états de grâce, d’invention et de conformisme, qui s’expliquent en partie par l’enfance de l’art. Ce tournage – moment capital de la modernité française et expérience existentielle extrêmement forte – restera pour les protagonistes comme une hantise. Notamment pour Edgar Morin qui pensera longtemps remonter une version plus longue du film. C’est dans cette optique d’un deuxième montage que les rushes ont été déposés au musée de l’Homme – où ils ont été retrouvés récemment. Dans cette grosse vingtaine d’heures de pellicule, Florence Dauman a puisé quelques séquences inédites, restituées dans leur durée, leur matérialité de rushes (amorces, claps, imperfections techniques, interventions in ou off des réalisateurs, etc.). Ces séquences, jusqu’à présent invisibles, redonnent au tournage sa dimension hautement expérimentale, et aux images et aux sons de 1960 une puissance cinématographique que le montage original a étouffé.
A voir le magnétisme de ces rushes, on comprend aisément le désir de la réalisatrice de faire retour vers ce film désormais culte, cinquante plus tard. Son documentaire s’inscrit dans un courant contemporain qui prend pour sujet des films plus anciens – non pas le réel passé mais le cinéma du réel passé – que ce soit pour retrouver les protagonistes (Florence Dauman interroge Edgar Morin et certains acteurs du film tels Marceline Loridan, Régis Debray, Jean-Pierre Sergent, Nadine Ballot), revenir sur les lieux du tournage ou revoir la pellicule originale, devenue l’archive d’un temps disparu.
L’édition patrimoniale en format DVD stimule sans doute la réalisation de ce type de documentaires et, de fait, la relative simplicité d’Un Eté + 50 ne fait pas échapper le document, comme l’appelle elle-même la réalisatrice, à son statut de bonus. Un Eté + 50 accompagne l’édition DVD de Chronique d’un été, tant dans sa version française chez Montparnasse, qu’américaine chez Criterion.
la méthode Morin-Rouch
Ce que rend manifeste le film de Florence Dauman, c’est la nature profondément originale du tournage de 1960. Dans le projet de film déposé pour l’accord CNC, Edgar Morin, aux tous premiers mots, le revendiquait : “Ce film est une recherche. Le milieu de cette recherche est Paris. Ce n’est pas un film romanesque. Cette recherche concerne la vie réelle. Ce n’est pas un film documentaire. Cette recherche ne vise pas à décrire ; c’est une expérience vécue par ses auteurs et ses acteurs.” D’emblée, et dans une veine rouchienne, la réalisation a été pensée comme une expérience collective – et libertaire – abolissant le partage habituellement établi entre protagonistes et metteurs en scène. “Les auteurs eux-mêmes se mêlent aux personnages : il n’y a pas de fossé de part et d’autre de la caméra, mais circulation et échanges.” De fait, Chronique d’un été débute sur une séquence réunissant Marceline et les deux réalisateurs plein cadre : d’emblée, Morin et Rouch – les vraies stars du film – exposent leur tentative, ses risques, leurs attentes et leurs craintes.
La transgression est plus forte encore dans la séquence Moineau, que l’on découvre dans Un Eté + 50. Morin et Rouch ont organisé un repas avec des ouvriers de chez Renault afin qu’ils témoignent devant la caméra de la condition ouvrière. On comprend qu’en off, un échange assez vif a opposé l’ingénieur du son du film, le fameux Moineau, et les ouvriers. En substance, il pense que les ouvriers sont des cons et qu’ils n’ont qu’à faire comme lui, travailler en indépendant pour le cinéma. Conformément à l’esprit du tournage, Moineau est sommé de redire le fond de sa pensée face à la caméra. Les rôles sont donc mouvants, interchangeables : Chronique d’un été partage avec les films contemporains de la Nouvelle Vague la remise en cause des pratiques traditionnelles et corporatistes du cinéma. Le document de Florence Dauman comporte ainsi toutes sortes d’indices qui renseignent sur l’originalité et la souplesse de la méthode Morin-Rouch, originalité qui n’ira pas sans provoquer des heurts avec Anatole Dauman, producteur du film. Plusieurs fois celui-ci tentera d’imposer des techniciens plus professionnels, ce à quoi s’opposera vigoureusement Rouch qui ne pouvait travailler que dans un cadre amical.
L’inventivité est particulièrement sensible dans les aspects techniques. L’arrivée de l’opérateur québécois Michel Brault, le perfectionnement progressif, tout au long du tournage, par l’ingénieur Coutant, de la caméra 16mm, jusqu’à l’enregistrement synchrone pour l’ultime séquence tournée en 1961, font de Chronique d’un été un moment clé de l’histoire du documentaire. Quelque chose s’invente d’encore indistinct, mais qui fera date et auquel le film devra une grande part de sa postérité.
format commercial
Cette dimension expérimentale a sans doute permis que se manifestent, au gré de la réalisation du film, des désirs différents de cinéma. Et si Chronique d’un été est un semi échec artistique, c’est sans doute parce qu’il a été le produit de trop de négociations et de compromis entre tous ces désirs et entre les différents acteurs du film (réalisateurs mais aussi producteur).
C’est ce que souligne Florence Dauman dans la scène finale d’Un Eté + 50. La longue montée, par l’ouvrier Angelo, de l’escalier qui conduit au Petit Clamard où il réside, est une manière de suggérer ce qui, dans Chronique d’un été, est si frustrant. Dans cette séquence, la réalisatrice restitue l’ascension dans sa durée et aussi l’excitation qui saisit l’équipe technique de pouvoir aussi simplement capter un moment de liberté (la sortie d’usine). Ce temps anodin, sans importance dramatique, sans enjeux narratif, Dauman nous le rend dans sa plénitude cinématographique. Et sur ces images, elle surimprime une citation de Rouch : “Ce qui importe c’est la durée même du document. Pour rentrer au Petit Clamart, Angelo doit monter un escalier invraisemblable. Cette montée devient une espèce de drame poétique. Pour montrer le film dans les salles, il va falloir couper. Ce document perdra de sa force, même sa raison d’être” (France Observateur, 1961).
Après les premiers montages réalisés par Rouch et son équipe (en dialogue constant mais mouvementé avec Morin), Anatole Dauman finit par imposer un monteur reconnu, Jean Ravel, pour finaliser le travail. Celui-ci est chargé de réaliser un montage cinéma qui remet en question le premier montage chronologique de Rouch. Ravel utilise la technique dite des rouleaux japonais : “Le montage du film est conçu à partir de dactylogrammes, transcriptions du contenu verbal du film.” 2 Cette technique, qui explique le ton haché de certaines séquences, focalisée sur la teneur du propos mais ignorant tout ce qui relève de l’expression non verbale, nuit au film : les intonations, les hésitations, la gestuelle inconsciente, le jeu des échanges et des répliques, tout ce qui spécifie le cinéma qui s’invente alors, art privilégié de la captation de ce que Morin appelle l’acte de parole, n’est pas pris en compte ; les coupes, omniprésentes, induisent un doute sur la parole qu’on entend, dont on ne peut jamais savoir si au fond elle n’a pas été détournée au montage. Peu respectueux de la durée des plans, les rouleaux permettent néanmoins de faire tenir, dans un format standard d’une heure trente, les séquences que chacun des réalisateurs juge non négociables.
Dans l’ouvrage Chronique d’un été 1, Rouch explique : “En fait j’avais devant Chronique la même angoisse que celle ressentie auparavant avec Moi un Noir et La Pyramide [humaine], celle de l’amputation. C’est sans doute là l’écueil le plus grave de tous ces films improvisés, sans scénario ni découpage : réduire à 1h30 un matériel énorme dont la valeur est l’authenticité, c'est-à-dire la longueur, les hésitations, les maladresses.” Les deux auteurs sont donc bien conscients, et presque dans l’instant, des limites de leur film.
apprentis sorciers
Dans une séquence inédite d’Un Eté + 50, Morin, déambulant dans le musée de l’Homme aux côtés de Rouch, a cette réplique pénétrante : “Nous sommes des apprentis sorciers !” Les réalisateurs jouent en même temps qu’ils inventent les règles. Ce qui ne va pas sans flottements, prises de risques mal évaluées. C’est peut-être ce que les apprentis sorciers – ces primitifs du cinéma direct – ont appris en cours d’aventure : tout le travail de réalisation consiste à éliminer et à maîtriser, au montage notamment, les aléas de l’expérimentation pour proposer au spectateur un ensemble de signes, visuels et sonores, cohérent : c’est cette cohérence interne qui emporte, dans le documentaire plus qu’ailleurs peut-être, la conviction du spectateur en ce qu’il voit : le film n’est pas un discours de connaissance, le pacte documentaire ne repose pas sur une accumulation de faits et l’enchaînement des arguments, mais sur la conviction transmise au spectateur que ce qui est montré a été honnêtement capté et tout aussi honnêtement restitué.
Comme l’indiquent les entretiens réalisés pour Un Eté + 50, le tournage de Chronique d’un été a été l’occasion, pour chacun des réalisateurs, d’explorer ses propres désirs de cinéma – désirs pas forcément compatibles. De ce point de vue, il faut sortir du partage rebattu distinguant d’un côté Rouch cinéaste, de l’autre Morin sociologue.
De fait, on gagne à considérer les choses différemment : il y a, en réalité, deux intuitions du cinéma et une zone de flou – avant tout conceptuel – entre les deux qui, précisément, fait lien. A l’origine du projet, il y avait la question soumise par Morin – comment vis-tu ? – qui est restée longtemps le titre provisoire du film. Après les premiers essais et presque deux mois de tournage, Rouch, pressentant que l’été 1960 serait riche (événements au Congo, pourparlers de paix entre la France et le FLN), propose de faire évoluer le questionnaire de manière à intégrer l’actualité politique : il avance l’idée de faire la chronique de l’été, c'est-à-dire de ces événements tels qu’ils se répercuteraient sur les protagonistes du film. Evolution que Rouch lui-même considérera, en cours de tournage, comme une tentative avortée.
commensalité vs pédovision
Ce sont aussi deux mises en scènes qui s’opposent ; depuis le début, Morin, qui cherche la vérité de la parole, met en exergue le principe de commensalité : on tourne dans un appartement privé, loin des studios, et c’est après de bon repas arrosés de bons vins que l’échange vrai va pouvoir se produire, la parole se libérer, les individus se désinhiber. C’est à la caméra et au magnétophone qu’il appartiendra alors de saisir le moment de vérité, le dévoilement intime. Comme on l’a dit, c’est l’acte de parole qui l’intéresse et le gros plan lui paraît la forme cinématographique à privilégier. Son intuition préfigure tout un pan du cinéma, dont l’enjeu sera la saisie du témoignage et la provocation de la parole – facilitées par les techniques légères.
A la commensalité, Rouch oppose la pédovision. L’arrivée de l’opérateur Michel Brault, précurseur de la caméra portée, va être l’occasion de toutes sortes d’expérimentations tant en terme d’instrumentation technique que de mise en scène. Rouch sort la caméra dans la rue, filme de courtes fictions lors de séjours à Saint-Tropez ou Saint-Jean-de-Luz (scènes de la plage, de la corrida, visibles dans Chronique d’un été ou Un Eté + 50). “Toute cette période Saint-Tropez, si elle était terriblement déprimante pour Edgar qui se sentait menacé par la fiction des psychodrames, était terriblement enthousiasmante pour Michel Brault et moi-même qui inventions notre nouvel outil.” 4 Rouch est tenté, contre l’ouvriérisme de Morin et ses questionnements existentiels, de dramatiser le film : il est un temps question de le structurer autour de deux ou trois figures centrales, en recourant à un canevas narratif (dans la continuité de La Pyramide humaine, qu’il monte parallèlement au tournage de Chronique).
L’étonnant est bien là : que la caméra légère et le son direct n’aient pas entraîné Rouch à une approche plus documentaire. Au contraire, ils ont consolidé son ardent désir de fiction. L’allégement des machines produit chez lui du cinéma romanesque, qui donne à certaines séquences de Chronique d’un été, et par contagion au film, une tonalité Nouvelle Vague – comme le note Régis Debray dans Un Eté + 50.
De ce point de vue, le long échange inédit entre Jean-Pierre et Marceline que l’on découvre dans le film de Florence Dauman, est tout à la fois pathétique et dérangeant. Filmés en bord de mer, assis au pied d’une jetée, les deux amants nous plongent une fois de plus dans les méandres de leur amour fragile et chancelant. La situation est créée artificiellement et les deux protagonistes jouent un rôle. Jean-Pierre clappe en souriant, et dans l’instant renoue avec son personnage d’amoureux goujat ; mais sur la durée de la séquence, le doute s’immisce et on ne peut plus décider si l’échange finalement n’est pas sincère. Dans un cas comme celui-ci, la fiction rouchienne sert la confession recherchée par ailleurs par Morin : tout se passe comme si, au creux des vents déchaînés, au maigre abri d’une digue, les mots d’amour trouvaient un havre secret (que le téléobjectif et le micro parviennent malgré tout à capter – mise en scène techniquement révolutionnaire). Mais cette séquence, longtemps débattue, ne trouvera finalement pas sa place dans Chronique d’un été. Découpée conformément aux règles du cinéma classique, avec changement d’angles multiples, elle ne peut être montée dans le cadre du cinéma vérité : le différentiel est trop grand avec les fragments de réalité filmés par ailleurs. Le jeu des acteurs est trop approximatif et surtout la mise en scène est trop visible pour que le raccord soit possible avec une prise de vue documentaire.
cinéma vérité
Le flou conceptuel qui permet que tous ces désirs de cinéma cohabitent, c’est justement cette notion de cinéma vérité. L’important est sans doute de comprendre qu’à l’origine du projet, cette indistinction a permis aux deux compères de croire qu’ils parlaient de la même chose.
Dans un entretien paru dans France Observateur, repris dans l’ouvrage Chronique d’un été, Morin explique : “Il s’agit de faire un cinéma-vérité qui surmonte l’opposition fondamentale entre le cinéma romanesque et le cinéma documentaire. Dans le cinéma romanesque, on traite les problèmes privés des individus : l’amour, la passion, la colère, la haine, alors que dans le film documentaire, jusqu’à présent, on ne traite que des sujets extérieurs aux individus : objets, machines, paysages, thèmes sociaux. Jean et moi sommes d’accord au moins sur un point : qu’il faut faire un film d’une authenticité totale, vrai comme un documentaire, mais ayant le contenu du film romanesque, c'est-à-dire le contenu de la vie subjective, de l’existence des gens.”
La double négation est frappante : ni fiction, ni documentaire. Morin forge une expression pour décrire cette troisième voie : il parle de cinéma vécu. L’une des questions est de savoir si le cinéma vécu est la même chose que le cinéma vérité. C’est sans doute le cas dans son esprit : si on arrive par la mise en situation (commensalité) à obtenir des protagonistes qu’ils agissent et parlent sincèrement devant la caméra, ce qui éclatera à l’écran, c’est la vérité de cette parole, de ces actes, de ces personnes mêmes. Morin a le sentiment que ses amis ou les amis de Rouch, ces personnes avec qui il s’entretient sur le tournage, vont découvrir quelque chose d’eux-mêmes à travers le cinéma : aventure de la vérité qui fera d’eux de véritables personnages de cinéma. Ce qu’il appelle cinéma vécu, c’est cette conviction : quiconque fait face avec sincérité à la caméra, a l’épaisseur du romanesque – il n’est donc pas besoin de recourir à la fiction cinématographique et à sa grammaire ; la caméra vivante suffit pour capter cette mutation de la personne en personnage. C’est le point de vérité de l’intuition de Morin – celui autour duquel tourne une partie des écritures contemporaines du documentaire.
Fascinante beauté de cette coréalisation. Les films antérieurs de Rouch expérimentaient à partir de présupposés exactement inverses : la vérité des personnes, c’était par la fiction des personnages qu’elle se manifestait – comme on le voit à l’œuvre dans la séquence sur la jetée, entre Marceline et Jean-Pierre 5. Evidemment, l’émouvante fragilité de Chronique d’un été réside dans le fait que le film porte en lui, comme des cicatrices, tous ces tâtonnements, toutes ces ambitions et tous ces désirs – sans en renier aucun complètement.
Incidemment, la question des rushes et de leur remploi sous forme d’archives, comme c’est le cas dans Un Eté + 50, provoque un constat inédit : regarder les films depuis leur source, et avec le recul, c'est-à-dire avec un savoir historique, politique, esthétique, induit par le simple passage du temps, en modifie profondément la réception. Recul qui requalifie ces images et ces sons, fait émerger des puissances ou des lacunes, sans doute pas si évidentes à l’époque de leur enregistrement. On peut en l’occurrence se demander si Un Eté + 50 ne nous convainc pas mieux que Chronique d’un été de la vigueur et de la valeur des intuitions des deux cinéastes.
De manière générale, faire repartir l’analyse depuis les rushes, c’est mettre en question (de façon parfois embarrassante) le montage et la réalisation du film qu’on étudie. Même si ces remarques valent avant tout pour le cinéma documentaire, il y a, en jeu, le dépassement de la forme film qui n’a pas fini d’être interrogée à mesure que notre accès à notre propre mémoire audiovisuelle sera facilité. Le film, entité sacrée, voulue par un auteur, donnée dans sa cohérence et sa perfection d’œuvre achevée, va, sans doute, et de plus en plus, être réestimée, réévaluée par l’inévitable mise en circulation des archives.
Le grand mérite du film de Florence Dauman est d’ouvrir le film original, en clarifiant ce qui ne pouvait relever que de l’implicite et du sentiment incertain : en libérant la force des rushes originaux, c'est-à-dire en désignant implicitement les limites du film, elle rachète l’erreur (n’avoir pas donné du temps au temps) du producteur original – son père 6. En rendant hommage à la fabuleuse histoire qu’a été le tournage du film, elle entrouvre la porte : l’espace par où se glissent la possibilité et le désir de bien d’autres films tirés des mêmes images, encore plus forts, plus justes, que l’œuvre originale.
Arnaud Lambert (mars 2014)
1 Edgar Morin, Chronique d’un film, dans Jean Rouch, Edgar Morin, Chronique d’un été [le livre], Paris, éd. Inter Spectacles, 1962. Le livre est dédié à Anatole Dauman, chaleureusement remercié : preuve de la solidarité et l’amitié qui unissait toutes ces personnes.
3 Le cinéma, une anthropologie du visuel, entretien avec Edgar Morin recueilli par Monique Peyriere, Cinémaction, Sociologie de l’image, sociologie par l’image, dirigé par Réjane Vallée, 1er trimestre 2013.
4 Note de Rouch sur le texte de Morin, dans Jean Rouch, Edgar Morin, Chronique d’un été, op. cit..
5 Ce que Gilles Deleuze ré-expose, en s’appuyant sur les films de Rouch et Perrault : “Quand Perrault s’adresse à ses personnages réels du Québec, ce n’est pas seulement pour éliminer la fiction, mais pour la libérer du modèle de vérité qui la pénètre, et retrouver au contraire la pure et simple fonction de fabulation qui s’oppose à ce modèle.” Sur Rouch : “Il faut que le personnage soit d’abord réel pour qu’il affirme la fiction comme une puissance et non comme un modèle : il faut qu’il se mette à fabuler pour s’affirmer d’autant plus comme réel, et non comme fictif.” Cinéma 2 - L'Image-Temps, Paris, éd.de Minuit, 1985.
6 Un an plus tard, Chris Marker réalise Le Joli Mai. Les 2h35 que durent le film n’empêcheront pas son exploitation commerciale.
A lire :
. La voix manquante, de Frédérique Berthet, coll. Traffic, éd. POL, 2018.