Accompagnée de deux ânes, une jeune troupe atypique traverse la campagne du centre de la France, suivant le chemin de Stevenson. Un metteur en scène et six infirmières et médecins encadrent six acteurs âgés de 6 à 16 ans, handicapés mentaux, pour parcourir une dizaine de kilomètres par jour et présenter de village en village La Route paradis, un spectacle écrit, chorégraphié et interprété par eux.

"Je les mets en scène au sens premier du terme," explique Bruno Boussagol intervenant au centre hospitalier Sainte-Marie du Puy-en-Velay. Les enfants ont improvisé, lu, écrit. Ils se sont inspirés du Petit Prince ou d’images aperçues pour composer à leur tour des mouvements, des scènes. Ils chantent, dansent, parlent jusqu’à s’inventer une langue. Jean-François dessine ; Jérémie tourne sur lui-même une valise à la main. Et les mots que l’aviateur adresse au Petit Prince - "Et toi, d’où tu viens mon p’tit bonhomme ?" - ont soudain une consonance particulière. Sur scène, Raphaël se débat avec un morceau de papier collant, mais en vient à bout. "Dans la vie courante, il aurait abandonné," remarque le pédopsychiatre. Une infirmière observe les enfants devenir plus autonomes, se défaire de l’angoisse. Discrète, la réalisatrice suit les répétitions, les heures de marche dans la verdure, l’accueil plus ou moins chaleureux des habitants et la vie en communauté de cette compagnie singulière.

(Pierre Notte)