Leidiane, Andreia et Negão vivent dans la favela de Juliana, au nord de Belo Horizonte, troisième ville la plus peuplée du Brésil. Sur le pas de leur porte, dans des maisons en briques toujours en cours de construction, baignées par une lumière blafarde, ils plaisantent, échangent des conseils, se racontent : prison, drogue, guerre des gangs, abus sexuels, la banalité de réalités quotidiennes. Andreia a décidé de quitter le quartier pour aller s’installer à Baronesa.

Sans misérabilisme, Juliana Antunes filme un monde que tout laisse présager comme misérable, celui des “pauvres de la périphérie”, comme ils se nomment eux-mêmes. Mais plutôt qu’un constat des conditions de vie dans la favela, soutenu par de larges vues urbaines ou une exploration du dédale des rues, le film s’attache à décrire un espace bien précis : celui du seuil des maisons. Un espace intangible qui relève à la fois de l’intime et de la sociabilité, où se jouent les rapports d’amitié et de voisinage. C’est là que s’échangent les paroles d’espoir, de bienveillance ou de réprobation. C’est là que se décide l’avenir de chacun quand la guerre des gangs envahit le quartier. Faut-il s’enrôler comme Negão, au risque de disparaître, ou partir plus loin, comme Andreia ? Peu à peu le film s’affirme comme un portrait de cette jeune femme. Non pas une biographie, mais le portrait d’un caractère. Celle qui, dans une lettre, souhaite à un ami détenu “só força” (que de la force), finira par aller construire sa maison au sommet d’une colline, méditant dans le soir parmi les briques et les barres d’acier qu’elle a montées toute seule.

(Sylvain Maestraggi)

(Attention, des scènes pourraient heurter la sensibilité de certains spectateurs).

Prix Renaud-Victor (doté par Images de la culture), FID Marseille 2017.