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Résumé
A Paris, la Fury Room propose un service qui s’imagine disruptif : moyennant quelques dizaines d’euros par tête, on vous équipe d'un casque et d'une barre à mine. Dans un sous-sol rempli de vaisselle et d’ordinateurs décatis, libre à vous de tout fracasser. Les jeunes cadres s’y pressent en team building : pour 15 euros de plus, on peut avoir une vidéo de son carnage.
Quelque part entre le temple néo-cool et la déchetterie, cette Fury Room offre un condensé d’aberrations. On y croise des trentenaires, sans doute guettés par le burn out, qui s’offrent à peu de frais l’illusion d’être furieux. Loïc, personnage central du film de Barbara Laïchi, est le jeune et modeste employé sans qui cette étrange boutique ne tournerait pas. Il réceptionne les lourds cartons de matériel obsolète, installe le tout tel un petit théâtre, puis nettoie vigoureusement les restes du carnage avant le suivant. Il a une côte cassée depuis quelques temps, déjeune sur le pouce, et pense rentrer chez les pompiers après ce job. Après le travail parvient à saisir ce que la startup nation recèle de nauséabond. Pour exiger de ses cadres des journées productives, elle doit leur offrir ces bien tristes soupapes, en tirant un dernier profit des surplus d’une consommation massive - dont l’obsolescence a sans doute été programmée par les cadres en question.
(Noé Vidal-Giraud)
Descriptif technique
- Production
- Les Ateliers Varan
- Participation
- Procirep
- Réalisation
- Barbara Laïchi
- Année
- 2019
- Durée
- 24'
- Double disque
- non
- Couleur / N&B
- couleur
- Genre
- Documentaire
- Diffusion
-
- Prêt aux particuliers par l'intermédiaire des médiathèques : oui
- Projection publique : oui
- Diffusion en ligne : oui
Avis
Sélectionné par
L'imaginaire de la startup nation cède vite devant la réalité concrète de ses lieux : ici c'est la Fury Room, espace pour tout fracasser dédié aux cadres surmenés qui pourraient bien péter un câble en cassant la gueule à leurs managers. Le film produit dans le cadre des formations assurées par les Ateliers Varan paraît de prime abord aussi à l'étroit dans son format TV Strip-Tease que le jeune prolétaire qui s'occupe de tout dans un local réduit. Au risque de l'accident de travail, quand ce n'est pas l'asphyxie. Le garçon emporte pourtant notre empathie en incarnant à la fois une figure du nouveau prolétariat contemporain et la réjouissance juvénile d'écouter du Mozart avant de pouvoir enfin devenir pompier : c'est-à-dire être utile à la vieille dame en lui ramenant son chat. L'innocence inentamée d'un gamin surexploité oppose alors un vif démenti à la fausse jeunesse de notre startupper en chef, enfant naturel du barbon Giscard.
Saad Chakali, Médiathèque Edouard Glissant, Le Blanc-Mesnil.