Il y a cinquante ans, le bel Antonio est parti pour le Brésil et n’est jamais revenu. Sa vieille mère, qui vit dans les montagnes du Portugal, ses frères et sa sœur s’expliquent comme ils peuvent le départ de ce fils indigne. Trop paresseux pour partir travailler en France, trop délicat pour reprendre la ferme familiale. De part et d’autre, les liens semblent rompus. Mais si un jour il revenait ?

Ana Maria Gomes signe un film touchant tant par les questions qu’il soulève que par la qualité de ses images. Cette ferme de pierres, isolée dans les montagnes, balayée par la lumière, est celle de sa grand-mère. Une femme en noir avec un regard d’acier, entourée de fils qui semblent avoir accepté la rudesse de la vie qu’a refusée leur grand-frère. Le film s’affronte à la complexité des liens familiaux. La famille est un corps et tout membre qui la quitte remet en question sa survie. La ferme autrefois florissante ne vaut plus rien, les frères qui ont travaillé jusqu’à la retraite soupçonnent celui qui est parti de mener la belle vie. L’amour se change en amertume. Mais le film raconte aussi une histoire de migration. Que sait-on des regrets de celui qui a quitté son pays ? La cime rocailleuse des montagnes invite à l’exil autant qu’à la nostalgie. Partie chercher son oncle au Brésil, la réalisatrice découvre un autre univers dont on ne saurait dire si c’est une meilleure destination.

(Sylvain Maestraggi)