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Résumé
En faisant le portrait de l’artiste performeuse trans brésilienne Linn da Quebrada (la Belle Cassée), Bixa Travesty (Pédale Travestie, son nom de scène) entend questionner le genre en épousant le panache et la verve sulfureuse de sa protagoniste. Originaire des quartiers périphériques de Sao Paulo, Linn se revendique "terroriste du genre" en gardant volontairement son sexe masculin, une manière d’échapper aux dictats hétéro-patriarcaux. Les cinéastes la suivent de la scène aux endroits les plus intimes de sa vie quotidienne.
Dans un pays particulièrement machiste où la transphobie est monnaie courante, Linn fait figure de résistante avec sa personnalité provocante et la mise en scène politique qu’elle met en oeuvre. Si elle nous éblouit et nous choque par son langage cru dès les premiers instants, si le film la suit nue jusque sous la douche avec sa mère ou ses proches, les réalisateurs se gardent bien d'une fascination mal placée. Linn tient un discours offensif sur le genre : opérée ou pas, ce n’est pas la question, elle se sent libre de simplement être. Si mal-être il y a, il provient de l’extérieur, du regard que les personnes cisgenres portent sur elle. Avec ses ami.e.s, elle évoque ainsi l’isolement, la violence des autres, avoir ou non des histoires d'amour avec des gays, résister à la fétichisation ; des problématiques qu’elle aborde notamment au cours d’une émission de radio qu’elle anime. Elle poursuit la mise en scène radicale d'elle-même jusqu'à son hospitalisation à la suite d’un cancer, dont elle sort victorieuse : rouge à lèvres, pauses érotiques, crâne ras avec la chimio, enrubanné de scotch. "On ne vous laissera pas tranquilles !" crie-t-elle dans son micro.
(Joffrey Speno)
Teddy Award du meilleur documentaire, Berlin Film Festival 2018.
Attention : des scènes peuvent heurter la sensibilité de certains spectateurs.
Descriptif technique
- Production
- Figa Films, DOT, Paleo TV, Valvula Produçoes
- Réalisation
- Claudia Priscilla, Kiko Goifman
- Année
- 2018
- Durée
- 75'
- Double disque
- non
- Couleur / N&B
- couleur
- Genre
- Documentaire
- Diffusion
-
- Prêt aux particuliers par l'intermédiaire des médiathèques : oui
- Projection publique : oui
- Diffusion en ligne : oui
Avis
Sélectionné par
Dans la très belle scène de nuit où Linn da Quebrada rampe, danse et rappe, éclairée d'une seule lampe torche, s'adressant directement à la caméra, se dévoile tout le projet du film de Claudia Priscilla et Kiko Goifman : faire un film avec Linn da Quebrada (nom en forme d'oxymore qui signifie belle et cassée, renvoyée à la plastique sensuelle de la chanteuse et à son origine modeste de la banlieue de Sao Paulo) et pas seulement sur elle. En plus du portrait d'une jeune artiste en pleine ascension, sur scène ou dans l'intimité de sa famille, les deux réalisateurs le conçoivent comme une performance qui met à jour toute la subversion de l'art de faire de son corps une arme politique et de revendiquer son identité sexuelle dans le Brésil contemporain qui a, depuis, consacré aux élections Jair Bolsonaro sur des programmes prônant des valeurs tradionnalistes et homophobes.
(Raphaëlle Pireyre, Images en bibliothèques)