Dans les cuisines de l'école hôtelière de Treignac en Corrèze, les poêles crépitent et les ordres fusent. Devant les fourneaux, une vingtaine de mineurs migrants se forme sous la supervision exigeante de la cheffe Catherine Grosjean. Immergés dans un élément emblématique de la culture française, ils ont deux ans pour obtenir leur CAP, eux pour qui la cuisine était au départ un choix par défaut. La pression monte à mesure que l'examen approche. De leur réussite dépendra leur avenir sur le sol français.

"Ils ont une énorme pression sur les épaules. Ils sont courageux," reconnaît Catherine Grosjean. Avant d'être parachutés à Treignac, Maurice, Abdou, Sidaly, Riju et les autres ont affronté l'épreuve de la migration. "Quand je suis en cuisine, je me sens bien. C’est un travail d’équipe, on est tous solidaires," raconte Maurice. À l'apprentissage du français s'ajoute celui du lexique culinaire. Une gastronomie française très codifiée, un personnel de cuisine très hiérarchisé : les jeunes apprentis découvrent la discipline nécessaire à leur bon fonctionnement. "En Afrique on voit pas les gens qui te crient dessus," remarque Sidaly. Derrière sa rigueur, la cheffe cache une passion inconditionnelle pour ses élèves. Resté en contact avec elle quelques années après, un "ancien" lui confie : "Vous m’avez donné le goût de la cuisine." Lors de stages, les jeunes s’immergent dans les établissements de la région, au contact de commerçants et de restaurateurs. La fin de l'année approche, vont-ils avoir leur diplôme ?

(Romain Hecquet)