Dans une ville de Biélorussie, un professeur d’anglais au chômage cherche du travail. Pour subvenir à ses besoins, il distribue des prospectus dans les boîtes aux lettres. Au cours de sa tournée se dévoile un paysage urbain blanchi par l’hiver, fait de grands ensembles, de routes, d’esplanades et d’arrêts de bus. Le temps semble suspendu. Gagner à la loterie reste-t-il le seul espoir d’un meilleur lendemain ?

Le film s’ouvre par un surprenant travelling : d’une vue de paysage enneigé nous passons à l’intérieur d’une pièce d’appartement en chantier. Par l’embrasure des portes, on aperçoit une femme qui s’affaire dans la cuisine, puis un homme qui téléphone recroquevillé dans le vestibule. D’emblée s’impose la sensation d’un temps immobile : l’homme, qui égrène les petites annonces, essuie le même refus appel après appel. Puis vient la tournée de prospectus dans les halls d’immeubles et les grands ensembles de la ville. Des espaces urbains démesurés et monotones qu’éveillent à peine quelques aplats de couleurs. Suivre cet homme, le perdre dans la foule, permettent à la réalisatrice de déployer dans cette fiction a minima de longs plans documentaires sur le pays. Dans une deuxième partie, le voyage à Minsk est là encore le prétexte à filmer la ville - la gare, le métro, la foule anonyme - dans une succession de plans fixes. Si cette retenue, cette langueur garderont jusqu’à la fin leur énigme, Yuliya Shatun semble avant tout nous faire partager les images d'un pays bien fermé.

(Sylvain Maestraggi)

Prix Renaud-Victor (doté par Images de la culture), FID Marseille 2018.