Il est 5h, Paris s’éveille alors que la réalisatrice se dirige vers les campements de migrants de la place Stalingrad. "5h du matin, c'est l'heure de la rafle policière". Dans les tentes installées sur des bouts de trottoirs, des centaines d'hommes et de femmes attendent une prise en charge sociale et une hypothétique régularisation, mais ils sont surtout soumis à une pression policière constante. C'est là que Hind Meddeb rencontre Souleymane, poète sur les routes de l’exil depuis 5 ans, que l'on va retrouver tout au long du film.

"Personne ne quitterait père et mère pour venir dormir ici dans la rue et vivre dans la douleur." Et pourtant, sur une dalle de béton ou un carré de pelouse au milieu du trafic routier, la survie s’organise. Des volontaires assurent les distributions de repas, on se lave directement dans l'eau du canal proche, on s'échange les informations sur les démarches à engager. Mais cette solidarité est mise à mal régulièrement par les interventions musclées de la police et la caméra nous place au coeur des brutalités. Les étrangers sont évacués en bus, les camions de nettoyage de la ville font le reste, broyant tentes, matelas, affaires personnelles. "Ils ont détruit nos abris. La police a effacé nos vies." Des membres d'associations s'interposent encore entre les exilés et la police, guident certains vers des structures d'hébergement. Face à cette désillusion, Souleymane, casquette vissée sur la tête, déclame des poèmes emplis de douceur et d’amertume en errant dans les rues du Nord parisien.

(Romain Hecquet)