Au début du XIX^e siècle, sur l’île Bourbon, future île de la Réunion, quelques riches familles créoles se partagent les plantations et les influences dans les domaines politique et judiciaire. L’esclavage est encore la clé de voûte de leur économie. En 1817, Furcy, déclaré esclave alors que né d’une mère indienne libre, assigne son maître en justice pour qu’on le reconnaisse libre ; c’est le début d’une lutte de plusieurs décennies qui se réglera à Paris devant la plus haute juridiction.

Furcy, le procès de la liberté retrace le combat d’un homme contre un système qui ne veut rien céder de ses privilèges en évitant toute jurisprudence, et met en évidence les luttes d'opposition entre une société coloniale esclavagiste et "une justice de France" plutôt libérale et favorable à l'abolition, en tous cas soucieuse de faire respecter son impartialité. Grâce aux épais dossiers d’archives (procès-verbaux, correspondances, jugements), l'affaire peut être parfaitement reconstituée. Débouté de sa plainte par son maître qui a fait pression sur le procureur général de l'île, Furcy est expédié sur l'île Maurice. Des années d'acharnement lui feront porter sa plainte jusqu'en Cour de cassation, où il obtiendra gain de cause en 1840, la Cour Royale le proclamant enfin "né libre". Mis en images avec des aquarelles animées qui se mêlent aux panoramas contemporains de la Réunion et de Maurice, le film reste tout en nuances sur le combat de Furcy, sans en faire l'emblème d'une lutte collective. De retour en homme libre à l’île Maurice, Furcy s’embourgeoisera… et achètera deux esclaves.

(Noé Vidal-Giraud)